Des nouvelle un peu rassurantes concernant la Directrice

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PostHeaderIcon Pouponnière de Bamako : VICTIME D'ACCUSATIONS INJUSTES ?

"Les décès de pensionnaires tiennent aux conditions parfois effroyables de leur abandon et non à de mauvais traitements ultérieurs, plaide la direction de l'institution."


lundi 4 avril 2011, par Doussou Djiré

La Pouponnière de Bamako se trouve au centre d'une controverse qui a largement débordé dans la presse, à propos de décès présumés dans les rangs de ses pensionnaires. Le mieux était de se rendre là-bas pour vérifier les conditions de vie des pensionnaires et de travail des agents chargés de faire fonctionner ce Centre d'accueil pour enfants orphelins et vulnérables. Communément désigné par le nom de « pouponnière », le centre a été crée en 1956. A l'époque, il accueillait les orphelins et les enfants nés de mères souffrant de déficiences mentales. Le rôle de la pouponnière s'est modifié en fonction de l'évolution sociale, avec l'apparition de phénomènes tels l'abandon d'enfants, l'infanticide et autres pratiques cruelles. En juin 1990, la pouponnière est rattachée à la Direction nationale de l'action sociale puis à la Direction nationale de la promotion de l'enfant et de la famille (DNPEF). Nouvel ancrage, nouvelles missions : l'accueil, l'entretien, l'éducation jusqu'à l'âge de trois ans des enfants abandonnés ou de parents inconnus, des orphelins sans soutien, des enfants de mères « malades mentales », et des enfants nés avec des handicaps (physiques ou mentaux). A Bamako, comme un peu partout dans le pays, les abandons d'enfants et les infanticides relèvent désormais d'une dramatique banalité. Jeunes (aide-ménagères ou citadines) et mêmes femmes mûres, n'hésitent pas à se débarrasser de leur enfant. Parfois de façon effroyable. Des enfants sont ainsi jetés sur un tas d'ordures, dans un caniveau ou dans une fosse septique. Une fois retrouvés, ces malheureux sont confiés à la pouponnière. Ces enfants, explique la directrice de l'institution, Mme Diallo Aminata Keita, arrivent à la pouponnière dans tous les états : bons, mauvais, voire odieux. « Les enfants nous viennent souvent dans des sachets plastiques après leur abandon sur des dépôts d'ordures, dans des caniveaux, dans des latrines ou à flanc de colline. Ils portent parfois les cicatrices d'une ou de plusieurs ruptures très douloureuses. Vu les conditions dans lesquelles nous les accueillons, les cas de décès sont souvent déplorés. Mais, cela n'implique nullement une quelconque faute de la pouponnière », se défend-t-elle.

CERTAINS AGONISENT ... Une fois accueilli, l'enfant est directement envoyé en observation à l'infirmerie du centre. Pour le médecin de la pouponnière, le Dr. Kalilou Traoré, la longueur de cette observation est fonction de la gravité de l'état de l'enfant. « Certains enfants arrivent totalement inanimés dans des sachets plastiques, des sacs ou des cartons fermés. D'autres découverts par des chiens, sont mordus, parfois déchiquetés. Ceux qui ont été déposés sur des tas d'ordures inhalent poussière et microbes de toutes sortes, contractant ainsi des difficultés respiratoires. Certains agonisent déjà lorsque nous les accueillons. Nous référons en urgence ces cas à la pédiatrie de l'hôpital Gabriel Touré. Certains bébés s'en sortent, d'autres succombent », décrit le médecin. Même les bébés accueillis de façon « normale », c'est-à-dire abandonnés après l'accouchement dans les centres de santé, développent souvent des anorexies dues à des troubles affectifs. A ces cas, il faut ajouter les enfants nés de parents séropositifs abandonnés, et des bébés soufrant d'hydrocéphalie et d'autres malformations congénitales. Bref à la pouponnière, chaque enfant est un cas, constate le Dr. Kalilou Traoré. De l'abandon des nouveaux-nés à leur adaptation à la pouponnière, le chemin peut être douloureux. Certains bébés éprouvent de fortes difficultés d'adaptation à leur nouvel environnement. Comme dans toute grande famille de plusieurs dizaines d'enfants, les cris et les pleurs des bébés sont incessants dans le centre. Dans ce cas, la femme la plus sollicitée est Mme Keita Fatoumata Dembélé, la gouvernante des nourrissons. Cette dame assiste les mères nourricières dans l'entretien quotidien des bébés et s'occupe de l'alimentation de ceux-ci. La salle qu'elle occupe ne désemplit jamais. Pendant qu'une fille lave des biberons, une autre s'occupe de les stériliser. Mme Keita, elle, s'occupe de la préparation du lait et des aliments complémentaires pour les bébés. « Je prépare les biberons en fonction de l'âge des bébés. Ici, quotidiennement, j'utilise une dizaine de boites de lait 1er âge (de la naissance à 4-5 mois), autant de lait de 2ème âge (de 5 mois à 1 an), trois boîtes de croissance (1 à 3 ans) et trois boîtes de Cerelac. Vous savez, les enfants peuvent nous parvenir dans un état de malnutrition très avancé. D'autres bébés atteints de troubles affectifs refusent le lait, mais de façon générale, les enfants acceptent bien le lait », témoigne la gouvernante. La directrice de la pouponnière reconnaît que, chaque année, l'institution enregistre des décès dûs à diverses causes. Mais, soutient-elle, la plupart étaient des enfants qui n'avaient pas encore été installés à la pouponnière : « Nous avons reçu des enfants extraits des latrines qui vomissaient des larves, des enfants déchiquetés par des souris et des chiens. D'autres déposés sur des fourmilières ont été rongés par les fourmis. La plupart de ces enfants décèdent à l'hôpital, lors de observation médicale ». « Pour les enfants déjà installés à la pouponnière, nous avons regretté cette année le décès de deux enfants qui souffraient d'hydrocéphalie très aigue », déplore-t-elle.

LES PORTES SONT OUVERTES. Le médecin du centre relève aussi le cas des enfants nés séropositifs, extrêmement fragiles et vulnérables qui développement fréquemment de nouvelles infections (pneumonie, anémie, diarrhée, perte de poids...) dues à la faiblesse de leur système immunitaire. « Les enfants que nous accueillons ici sont vulnérables car, la plupart développent une des complications les plus fréquentes chez les enfants mal nourris. Certains viennent avec une diarrhée aiguë, complètement déshydratés, d'autres avec des infections dont les plus fréquentes sont les broncho-pneumopathies, les otites, la coqueluche, la tuberculose, voire la septicémie. Autres complications rencontrées ici, la défaillance cardiaque en cas de Kwashiorkor, d'hypoglycémie, d'hypothermie, parfois des lésions oculaires » ajoute le spécialiste. La pouponnière doit sa longévité à l'apport inestimable des partenaires et des bonnes volontés. Service public rattaché à la direction nationale de la promotion de l'enfant et de la famille (DNPEF), elle reçoit chaque trimestre 5.330.000 Fcfa de l'Etat. Une somme nettement insuffisante pour la prise en charge des enfants. L'institution se tire d'affaire grâce à l'apport de partenaires (fondations, Ong, associations et personnes de bonne volonté). La prise en charge des nourrices par exemple est assurée par ces partenaires, explique la directrice. « Certaines structures telles la Fondation pour l'enfance, nous épaulent par des dotations en produits alimentaires et nous apportent un soutien financier. Des bonnes volontés apportent souvent des médicaments, des vêtements pour bébé, des biberons, du lait etc... », relève-t-elle. Mme Diallo déplore les accusations injustes relayées par la presse car elles découragent les travailleurs de la pouponnière qui se dévouent au quotidien et surtout les partenaires de l'institution. « Nous vivons ici avec ces enfants, nous partageons des moments de joie et de peine. Il faut vraiment être une personne dénuée de tout amour pour faire du mal à ces enfants que nous considérons comme les nôtres. Les portes de la pouponnière sont amplement ouvertes à tous ceux qui veulent avoir des informations ou même s'imprégner de notre quotidien », assure-t-elle. L'invitation est lancée.

***** Nourrice : UN METIER D'AMOUR

La plupart des nourrices sont venues dans ce métier à cause de l'amour qu'elles portent aux enfants ou encore pour les aider à accéder à un avenir meilleur. Salimata Fofana, nourrice du dortoir n°5, explique ainsi qu'en plus de l'amour et du courage, la connaissance de certaines notions en matière d'alimentation de l'enfant et de certaines maladies infantiles sont nécessaires pour pouvoir s'occuper convenablement des ces enfants. « Ce travail nécessite également au préalable des connaissances dans des domaines comme l'hygiène, soins élémentaires de santé. Après plus de 10 ans vécus ici, je peux dire que ces enfants ont beaucoup de chance car ils sont soigneusement entretenus et surveillés de très près par les agents de santé. Au moindre signe, nous alertons les agents et respectons les doses et horaires de médication, ce qui est aussi valable pour l'alimentation », détaille-t-elle. Pour Mme Sindé Kouyaté, une doyenne du Centre d'accueil pour enfants orphelins et vulnérables, les nourrices sont les piliers de la pouponnière. « Je suis là depuis 20 ans, j'ai pu me rendre compte de l'abnégation de ces femmes. Amour, régularité, hygiène, bon usage des matériels surtout les biberons qu'il faut manier avec prudence constituent entre autres atouts pour réussir dans ce métier. Il faut aussi savoir surveiller la santé de l'enfant. Au moindre signe il faut alerter les agents et savoir donner les médicaments en respectant les doses et horaires », souligne la doyenne. Cependant la prise en charge de ces dames dépend en partie de l'aide financière de partenaires de la pouponnière. Ce statut est incertain car cet apport peut tarir du jour au lendemain. La solution ne réside-t-elle pas dans leur intégration à la fonction publique ou dans tout autre statut qui leur apporterait des garanties à la hauteur de leur dévouement ?




01/06/2011
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